Combien de fois peut-on prolonger un arrêt maladie ? Règles et limites
- Le Bouard Avocats
- 12 juin
- 7 min de lecture
Dernière mise à jour : 18 juin
Combien de fois peut-on prolonger un arrêt maladie ? l’essentiel à retenir
Aucun plafond légal : la loi ne limite pas le nombre de prolongations ; seule l’évolution médicale fait foi.
Plafonds d’indemnisation : 12 mois d’IJSS sur 3 ans (cas général) ; 36 mois en affection longue durée (ALD).
Prescription encadrée : seul le médecin traitant, son remplaçant ou un spécialiste mandaté peut renouveler, puis transmettre sous 48 h l'arrêt maladie.
Nouveau délai de carence : il réapparaît si plus de 48 h séparent la reprise et la nouvelle ordonnance, la CPAM considérant alors un nouvel arrêt.

Fondements juridiques de la prolongation d’arrêt maladie
Sources légales et réglementaires
Code de la sécurité sociale : articles L 323-1 à L 323-6 fixent les conditions de prescription, les obligations de transmission à la caisse primaire et les modalités d’indemnisation journalière.
Code du travail : articles L 1226-1 et suivants préservent le contrat de travail pendant l’absence et précisent le maintien de l’emploi.
Doctrine CNAM, circulaires DSS et avis de l’Ordre des médecins complètent l’édifice ; elles rappellent l’exigence d’une justification médicale stricte et le rôle central du médecin traitant.
Distinction arrêt initial / prolongation
La prolongation est définie par l’annexe 3 de la circulaire DSS du 19 juillet 2019 : il s’agit d’un certificat qui prend effet le lendemain de la date de fin de l’arrêt initial sans solution de continuité. Deux critères cumulatifs :
la pathologie demeure identique ;
la date de prescription est antérieure à la reprise effective du travail.
Toute prescription intervenue plus de 48 heures après la reprise est analysée comme un nouvel arrêt, avec application d’un nouveau délai de carence et ouverture d’un compteur d’IJSS distinct.
Limites de durée et de fréquence de l'arrêt maladie : que dit la loi ?
Nombre officiel de prolongations d'un arrêt : l’absence de plafond légal
Ni le Code de la sécurité sociale ni le Code du travail ne fixent de quota. Le principe est purement médical : tant que l’état de santé du salarié le justifie, le médecin prescripteur peut renouveler.
Toutefois, la caisse d’assurance maladie peut déclencher un contrôle systématique au-delà de trois certificats successifs ou d’une durée continue de six mois.
Durée maximale d’indemnisation
Régime général : l’article R 323-1 du CSS plafonne à 12 mois d’IJSS sur une période glissante de trois ans (consécutifs ou non).
Affection de longue durée (ALD) : l’article L 324-1 autorise jusqu’à 36 mois d’IJSS continues, avec possibilité d’un nouveau cycle après reprise d’au moins un an.
Au-delà, l’assuré bascule vers l’invalidité (CSS, art. L 341-1).
Situation de l’arrêt | Plafond IJSS | Référence légale |
Cas général | 12 mois sur 3 ans glissants | C. séc. soc., art. R 323-1 |
Affection longue durée (ALD) | 36 mois consécutifs ou non | C. séc. soc., art. L 324-1 |
Accident du travail / maladie professionnelle | Pas de limite de durée | C. séc. soc., art. L 433-1 s. |
Impact du délai entre deux arrêts
Rechute < 48 h : assimilée à la prolongation, pas de nouveau délai de carence ; le compteur IJSS reste ouvert.
Nouvel arrêt ≥ 48 h : nouveau délai de carence, réexamen des droits, éventuelle suspension du maintien de salaire conventionnel.
À retenir : la question « Combien de fois peut-on prolonger un arrêt maladie ? » se heurte moins à un plafond arithmétique qu’aux seuils d’indemnisation et aux contrôles renforcés. Pour sécuriser la situation d’un salarié comme d’un employeur, il convient de vérifier :
la continuité médicale et la date de prescription ;
la capacité restante au regard du plafond de 12 ou 36 mois ;
l’incidence sur le maintien de salaire prévu par la convention collective.
Procédure pratique de prolongation d'un arrêt maladie pour un salarié
Qui peut prescrire ? médecin traitant, remplaçant, spécialiste
L’article R 323-1 du Code de la sécurité sociale réserve la prolongation au médecin prescripteur initial ou, à défaut, à son remplaçant dûment déclaré. À titre dérogatoire :
le spécialiste mandaté par le médecin traitant ;
le praticien hospitalier qui suit le salarié durant une hospitalisation.En dehors de ces cas, la caisse refusera l’IJSS et requalifiera la prescription en arrêt initial, avec nouvelle carence.
Délais de transmission : 48 h à la CPAM et à l’employeur
Le certificat de prolongation comprend trois volets ; les volets 1 et 2 doivent parvenir à la CPAM dans les 48 heures (CSS, art. R 323-2). Le volet 3, destiné à l’employeur, obéit au même délai. Le non-respect entraîne, après mise en demeure, une retenue d’indemnités pouvant atteindre 50 % des IJSS (art. R 323-3).
Téléconsultation et limitations
Depuis le décret du 7 décembre 2023, l’arrêt prescrit en téléconsultation ne peut excéder trois jours, sauf si le médecin téléconsultant est le traitant reconnu dans le parcours de soins. Au-delà du triennal, une consultation physique est obligatoire.
Conséquences financières pour le salarié et l’employeur
Indemnités journalières : calcul, carence, franchise
Hors accident du travail, la franchise de trois jours demeure (CSS, art. L 323-1). Les IJSS représentent 50 % du salaire journalier de base calculé sur les trois derniers mois bruts, plafonné à 1,8 Smic. Au-delà de 30 jours d’arrêt, le taux majoré de 66,66 % peut s’appliquer si le salarié justifie d’au moins trois enfants à charge.
Maintien de salaire et conventions collectives
Conformément à l’article L 1226-1 du Code du travail, l’employeur verse une indemnité complémentaire après un an d’ancienneté. Les conventions collectives élargissent souvent ce régime ; il convient de vérifier la grille propre au secteur (bâtiment : 90 % du brut pendant 90 jours, par exemple).
Perte de rémunération après trois mois
Passé 90 jours, la prise en charge bascule fréquemment sur la prévoyance de branche ; la subrogation permet à l’employeur de percevoir directement les IJSS qu’il rétrocède ensuite, neutralisant la trésorerie du salarié.
Contrôles et contentieux potentiels en lien avec une prolongation d'arrêt maladie
Médecin-conseil de la CPAM vs médecin du travail
Le médecin-conseil apprécie la légitimité médicale de la prolongation ; le médecin du travail, lui, statue sur l’aptitude à la reprise. Le premier peut interrompre l’IJSS, le second imposer un aménagement de poste.
Contre-visite patronale et sanctions
L’employeur qui maintient le salaire dispose, en vertu de l’article L 323-6 CSS, d’un droit de contrôle : contre-visite à domicile par un praticien mandaté. En cas de sortie injustifiée ou d’absence, la retenue du complément conventionnel est licite.
Licenciement pour absence prolongée
Le licenciement reste envisageable, mais à des conditions strictes : désorganisation durable de l’entreprise et impossibilité de remplacement définitif (Cass. soc., 23 janv. 2002). Toute résiliation motivée par la seule maladie serait nulle et exposerait l’employeur à une indemnisation pour discrimination fondée sur l’état de santé.
Reprise du travail et visites obligatoires
Visite médicale de reprise (≤ 8 jours, C. trav., art. R 4624-31)
La suspension du contrat de travail pour maladie se clôt par une étape médicale impérative : la visite de reprise. L’employeur doit la solliciter auprès du service de prévention et de santé au travail dans les huit jours qui suivent la réintégration lorsque :
l’arrêt, prolongations comprises, a excédé 60 jours ;
l’absence résulte d’un accident du travail avec arrêt d’au moins 30 jours ;
la pathologie est reconnue maladie professionnelle, quel que soit le délai.
Cette visite conditionne la reprise effective. Sans l’avis d’aptitude, le salarié ne peut être remis à son poste, sous peine de manquement à l’obligation de sécurité (C. trav., art. L 4121-1).
Le médecin du travail peut conclure à une aptitude simple, à une aptitude avec réserves (aménagements horaires, gestes proscrits) ou à une inaptitude.
Reprise anticipée du travail et mi-temps thérapeutique
Le salarié qui s’estime rétabli avant l’échéance mentionnée sur le certificat initial peut solliciter une reprise anticipée. Le médecin traitant délivre alors un certificat de reprise anticipée, transmis à la CPAM et à l’employeur ; aucun délai de carence supplémentaire n’est dû.
Autre modalité : le mi-temps thérapeutique (CSS, art. L 323-3). Il suppose l’accord tripartite : médecin prescripteur, caisse d’assurance maladie et employeur. Le salarié alterne travail à temps partiel et indemnités journalières, pendant une durée négociée (souvent trois à six mois).
Situations spécifiques : vacances, cumul d’arrêts et impact sur la retraite
Vacances hors département en arrêt maladie
Quitter son département pendant un arrêt prolongé nécessite l’autorisation préalable de la CPAM (CSS, art. R 323-11). À défaut, l’assuré s’expose à la suspension des IJSS et, côté employeur, à la retenue des compléments conventionnels.
Cumul de plusieurs arrêts dans l’année
Le droit ne fixe pas de plafond annuel. Toutefois, les arrêts successifs sont agrégés pour le calcul du plafond d’indemnisation de 12 mois sur 3 ans (CSS, art. R 323-1). Chaque arrêt redémarre la franchise de trois jours sauf s’il est prescrit dans les 48 heures suivant le précédent (cas de rechute).
Incidence sur le décompte de la retraite
Les périodes indemnisées par l’assurance maladie valident des trimestres assimilés (CSS, art. L 351-3-1). Néanmoins, l’interruption d’activité réduit la base de calcul du salaire annuel moyen, susceptible d’infléchir la pension. Les arrêts non indemnisés n’ouvrent aucun droit.
FAQ : prolongation d’arrêt maladie
Combien de fois peut-on prolonger un arrêt maladie ?
Autant que l’état de santé le requiert ; aucun plafond légal n’existe. La CPAM peut toutefois diligenter un contrôle au-delà de six mois continus.
Quelles démarches pour obtenir une prolongation d'un arrêt maladie ?
Les démarches débutent par une consultation auprès du médecin traitant, généralement avant la date d’expiration de l’arrêt de travail initial. Si l’état de santé le justifie, il délivre un nouveau certificat médical portant la mention « prolongation ».
Le salarié doit ensuite transmettre les volets réglementaires : 48 heures pour la CPAM et pour l’employeur, afin d’assurer la continuité de l’indemnisation et du maintien de salaire.
Quel délai de carence s’applique lors d’un renouvellement ?
Aucun, si la prolongation s’enchaîne sans interruption. Un arrêt prescrit après reprise enclenche une nouvelle franchise de trois jours.
Comment se passe la reprise du travail après l'arrêt maladie ?
La reprise du travail est encadrée par le médecin du travail, seul compétent pour délivrer l’avis d’aptitude ou d’inaptitude. Le salarié doit présenter un certificat médical de clôture d’arrêt, puis se rendre à la visite de reprise prévue à l’article R 4624-31 du Code du travail.
Au cours de cet examen, le praticien vérifie la santé du salarié et détermine si l’activité professionnelle peut être reprise à temps complet, sous réserve d’aménagements, ou en mi-temps thérapeutique. L’employeur ne peut autoriser la reprise avant cet avis formel.
Peut-on prolonger un arrêt sans consulter son médecin ?
Non. Toute prolongation doit émaner d’un acte médical établi en présence du salarié ou, à titre dérogatoire, d’une téléconsultation ne dépassant pas trois jours.
Quelle durée maximale toutes prolongations incluses ?
L’indemnisation est plafonnée à 12 mois sur une période triennale, portée à 36 mois en affection longue durée (ALD).
Quelles conditions strictes doit remplir la prolongation ?
Continuité de la pathologie, prescription avant la reprise, justification médicale précise et respect des délais de transmission.