Comment organiser le nouvel entretien de parcours professionnel imposé par la loi 2025-989 ?
- Le Bouard Avocats
- il y a 5 jours
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Ce que change réellement la réforme de 2025 pour l’entretien de parcours professionnel
La loi n° 2025-989 remplace l’entretien professionnel par l’entretien de parcours professionnel, élargissant son contenu à l’analyse du parcours, des compétences, des besoins de formation et des perspectives d’évolution.
La périodicité évolue : entretien dans l’année suivant l’embauche, puis tous les quatre ans, avec un état des lieux obligatoire tous les huit ans.
L’entretien devient un outil articulé avec la santé au travail, notamment via un entretien obligatoire dans les deux mois suivant la visite médicale de mi-carrière.
Les employeurs doivent désormais aborder les conditions de maintien dans l’emploi et les aménagements de fin de carrière pour les salariés dans les deux années précédant leur 60e anniversaire.
Les obligations de documentation, de traçabilité et de conformité se renforcent, avec à la clé des risques d’abondements correctifs du CPF et des contentieux liés à l’obligation de formation et de sécurité en cas de manquement.

Un dispositif entièrement repensé par la loi de 2025
La loi n° 2025-989 du 24 octobre 2025 réforme en profondeur l’entretien professionnel pour créer l’entretien de parcours professionnel, désormais inscrit à l’article L 6315-1 du Code du travail.Ce changement n’est ni cosmétique ni symbolique.
Il marque une évolution vers une approche beaucoup plus complète, centrée sur la gestion des compétences, la prévention de l’usure professionnelle et l’anticipation des fins de carrière.
Pour les employeurs, l’obligation ne disparaît pas : elle s’élargit et se structure davantage. Pour les salariés, l’entretien devient un véritable outil de projection et d’accompagnement.
Une finalité élargie : accompagner le parcours plutôt que la seule formation
Jusqu’en 2025, l’entretien professionnel était centré sur les perspectives d’évolution et les projets de formation.La réforme élargit considérablement son contenu. L’entretien de parcours professionnel doit désormais aborder :
les compétences et qualifications mobilisées dans l’emploi actuel et leurs évolutions possibles ;
la situation et le parcours professionnels du salarié au regard des transformations de l’entreprise ;
les besoins de formation liés au poste, à son évolution ou à un projet personnel ;
les souhaits d’évolution professionnelle, incluant la reconversion interne ou externe, le projet de transition professionnelle, la VAE ou le bilan de compétences ;
l’utilisation du compte personnel de formation, les abondements éventuels et le recours au conseil en évolution professionnelle.
Ce cadre étendu est imposé directement par la nouvelle rédaction de l’article L 6315-1, qui détaille de façon précise les thématiques à traiter.Il reste toutefois un point constant : l’entretien de parcours professionnel ne peut pas porter sur l’évaluation du travail du salarié.
Des modalités pratiques clarifiées et renforcées
La loi introduit également des garanties opérationnelles. L’entretien :
doit être organisé par l’employeur ;
doit être conduit par un supérieur hiérarchique ou un représentant de la direction ;
se déroule obligatoirement sur le temps de travail ;
donne lieu à un document écrit remis au salarié.
Le texte prévoit aussi un accompagnement possible :les salariés des entreprises de moins de 300 salariés peuvent préparer cet entretien avec un conseil en évolution professionnelle ; l’employeur peut être épaulé par son opérateur de compétences, voire par un organisme externe si un accord collectif le prévoit.
Une périodicité profondément modifiée
La réforme infléchit fortement le calendrier.Désormais :
un entretien de parcours professionnel doit être réalisé dans l’année suivant l’embauche ;
puis un entretien doit se tenir tous les quatre ans, et non plus tous les deux ans ;
l’état des lieux récapitulatif, qui vérifie le respect des obligations de l’employeur, intervient désormais tous les huit ans (contre six auparavant).
Le premier état des lieux peut être réalisé sept ans après le premier entretien lié à l’embauche.
Les entreprises couvertes par un accord collectif aménageant la périodicité devront mettre cet accord en conformité avant le 1er octobre 2026, faute de quoi la nouvelle périodicité s’appliquera automatiquement.
Un lien direct avec la visite médicale de mi-carrière
La grande nouveauté de la loi de 2025 est l’articulation obligatoire entre l’entretien de parcours professionnel et la visite médicale de mi-carrière, prévue à l’article L 4624-2-2.
Dans les deux mois suivant cette visite, l’employeur doit organiser un entretien de parcours professionnel comportant des sujets supplémentaires :
les mesures recommandées par le médecin du travail (sans accès aux données de santé) conformément à l’article L 4624-3 ;
l’adaptation ou l’aménagement du poste ;
la prévention des situations d’usure professionnelle ;
les besoins de formation liés à la seconde partie de carrière ;
les souhaits éventuels de mobilité ou de reconversion.
Un document spécifique doit en retracer les conclusions, formant un bilan distinct au sein du parcours du salarié.

Un entretien dédié dans les deux années précédant les 60 ans
La réforme introduit un second moment clé pour les salariés expérimentés.Lors du premier entretien de parcours professionnel organisé dans les deux années précédant le soixantième anniversaire du salarié, doivent être abordés :
les conditions de maintien dans l’emploi ;
les aménagements envisageables de fin de carrière (temps partiel, retraite progressive, transitions) ;
les besoins de formation permettant de soutenir cette adaptation.
L’objectif est d’éviter les ruptures subies et de préparer, en amont, les ajustements nécessaires.
Quelles obligations opérationnelles pour les employeurs ?
La mise en place du nouvel entretien de parcours professionnel impose aux entreprises de revoir leurs pratiques internes. Elles devront notamment :
mettre à jour les supports d’entretien et les procédures RH ;
former les managers à la conduite de ce nouvel entretien, distinct de l’évaluation ;
adapter leurs outils de suivi pour intégrer les nouvelles échéances (1 an – 4 ans – 8 ans), la mi-carrière et l’entretien pré-60 ans ;
renégocier leurs accords d’entreprise ou de branche ;
documenter précisément la tenue des entretiens et les informations transmises.
Ce travail n’est pas seulement administratif : il conditionne la capacité de l’entreprise à démontrer, en cas de litige, le respect de ses obligations légales en matière d’adaptation, de formation et de prévention.
Quels risques en cas de manquement au nouvel entretien de parcours professionnel ?
L’absence d’entretien ou un entretien incomplet peut exposer l’employeur à plusieurs conséquences.L’état des lieux de huit ans peut entraîner l’obligation de procéder à des abondements correctifs du CPF au bénéfice du salarié.
De manière plus large, les manquements peuvent alimenter :
des demandes liées à l’obligation d’adaptation (article L 6321-1) ;
des griefs relatifs à l’obligation de prévention de l’usure professionnelle ;
des actions en manquement à l’obligation de sécurité.
À l’inverse, un entretien de parcours professionnel correctement documenté devient un élément essentiel de preuve, permettant d’attester d’un suivi régulier du parcours et d’une anticipation réelle des risques.
Une réforme structurante pour la gestion des parcours en entreprise
En remplaçant l’entretien professionnel par l’entretien de parcours professionnel, la loi de 2025 institue une logique continue : intégrer l’évolution des compétences, sécuriser les transitions, anticiper la mi-carrière et préparer la fin de carrière.
L’entretien devient ainsi un outil stratégique à la croisée :
de la gestion des compétences,
de la santé au travail,
et du dialogue social.
Pour les employeurs, il s’agit d’un changement culturel : passer d’un rendez-vous administratif à un levier de gestion prévisionnelle du capital humain.
Pour les salariés, c’est l’opportunité de mieux orienter leur trajectoire professionnelle dans un monde du travail en constante transformation.
FAQ – Entretien de parcours professionnel
L’entretien de parcours professionnel remplace-t-il définitivement l’entretien professionnel ?
Oui. Depuis la loi n° 2025-989, l’entretien professionnel est remplacé par l’entretien de parcours professionnel, désormais régi par l’article L 6315-1 du Code du travail. Le changement n’est pas terminologique : il modifie en profondeur la finalité, le contenu et la périodicité du dispositif.
L’entretien couvre désormais les compétences mobilisées, les évolutions possibles du poste, la prévention de l’usure professionnelle, les souhaits de mobilité ou de reconversion, ainsi que l’usage du CPF.
Les entreprises doivent mettre à jour leurs process internes et leurs supports pour se conformer au nouveau cadre légal.
À quelle fréquence l’entretien de parcours professionnel doit-il être réalisé ?
Le calendrier est profondément revu. Un entretien doit être organisé dans l’année suivant l’embauche, puis tous les quatre ans. L’état des lieux récapitulatif, qui vérifie le respect par l’employeur de ses obligations de formation, intervient désormais tous les huit ans.
Le premier état des lieux peut être réalisé sept ans après l’entretien lié à l’embauche.
Les entreprises disposant d’accords d’entreprise ou de branche aménageant la périodicité auront l’obligation de réviser ces accords avant le 1er octobre 2026.
Quel est le lien entre l’entretien de parcours professionnel et la visite médicale de mi-carrière ?
La loi rend obligatoire l’organisation d’un entretien de parcours dans les deux mois suivant la visite médicale de mi-carrière.
Ce rendez-vous doit intégrer les mesures proposées par le médecin du travail, sans que l’employeur puisse accéder aux données de santé du salarié.
L’entretien comporte également un volet consacré à l’adaptation du poste, à la prévention de l’usure professionnelle, à la formation nécessaire pour la seconde partie de carrière et aux éventuelles mobilités envisagées.
Existe-t-il des obligations particulières pour les salariés proches de 60 ans ?
Oui. Lors du premier entretien de parcours intervenant dans les deux années précédant le 60e anniversaire, l’employeur doit examiner les conditions de maintien dans l’emploi et les possibilités d’aménagement de la fin de carrière, notamment le passage au temps partiel ou la retraite progressive.
Ce dispositif vise à préparer les transitions et à prévenir les ruptures subies, en garantissant au salarié un accompagnement juridique structuré.
Quels risques encourt l’employeur en cas de manquements ?
Le non-respect des obligations liées à l’entretien de parcours professionnel peut entraîner un abondement correctif du CPF au bénéfice du salarié lors de l’état des lieux de huit ans. En parallèle, un défaut de suivi peut être invoqué au titre de l’obligation d’adaptation (article L 6321-1) ou de l’obligation de sécurité.
L’entretien devient ainsi un élément déterminant de preuve en matière de formation, de prévention de l’usure et de gestion des parcours professionnels. Une documentation rigoureuse est indispensable pour sécuriser les pratiques.
