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Rupture partielle d'une relation commerciale établie : comment évaluer le préjudice ?

  • Photo du rédacteur: Le Bouard Avocats
    Le Bouard Avocats
  • 28 avr.
  • 5 min de lecture

Ce qu’il faut retenir sur la rupture partielle d'une relation commerciale établie


  • Le préjudice indemnisable en cas de rupture partielle d'une relation commerciale établie correspond à la diminution de la marge brute escomptée sur la seule durée du préavis non respecté, sans tenir compte des marges réalisées après cette période.

  • La rupture partielle est caractérisée par une baisse significative et volontaire des commandes, sans extinction totale de la relation, nécessitant un préavis écrit tenant compte de la durée de la relation.

  • La méthode d’évaluation repose sur le calcul de la marge moyenne mensuelle antérieure, appliquée à la durée du préavis, en déduisant uniquement les marges réalisées pendant la période d'insuffisance de préavis.

  • La prudence contractuelle impose de formaliser les relations commerciales par écrit et d’insérer des clauses de préavis pour se prémunir contre tout litige ultérieur.




avocat droit commercial et des affaires à Versailles



Comprendre la rupture partielle d’une relation commerciale établie


La rupture brutale d’une relation commerciale établie constitue un manquement grave, sanctionné par le droit français au titre de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce (devenu L. 442-1, II depuis l'ordonnance du 24 avril 2019).Toutefois, l’évaluation du préjudice pose des difficultés particulières lorsque la rupture est partielle, c’est-à-dire lorsqu’elle se manifeste par une baisse significative de commandes sans extinction totale de la relation.


Il est acquis qu'une rupture partielle peut engager la responsabilité de son auteur dès lors qu’elle est brutale et non justifiée par un motif légitime ou par les usages du commerce.

Encore faut-il déterminer avec précision l'ampleur du préjudice indemnisable.


Ce que dit le droit sur la rupture partielle de relations commerciales


Les principes généraux applicables


En matière de rupture brutale de relation commerciale établie, la jurisprudence retient que seul le préjudice résultant du caractère brutal de la rupture peut être indemnisé, et non la rupture elle-même [[Cass. com., 10 févr. 2015, n° 13-26.414]].


Ainsi, pour évaluer le préjudice, il convient d’estimer la marge brute escomptée pendant la durée du préavis non respecté, et d'y appliquer, le cas échéant, certaines déductions.


La spécificité des ruptures partielles


Lorsque la rupture est partielle, la relation commerciale perdure, mais dans des conditions sensiblement altérées. La Cour de cassation rappelle que l’évaluation du préjudice doit tenir compte de la diminution de la marge brute escomptée sur la période du préavis non respecté, sans déduction des marges réalisées postérieurement [[Cass. com., 29 janv. 2025, n° 23-19.972]].


Cette solution, conforme au principe de la réparation intégrale du préjudice, impose une méthode rigoureuse de calcul.



Comment évaluer le préjudice en cas de rupture partielle ?


Déterminer le montant de la marge brute perdue


L'évaluation du préjudice passe par plusieurs étapes incontournables :


  • Calculer la marge moyenne mensuelle réalisée avec le partenaire économique sur une période de référence (souvent les trois dernières années) ;

  • Multiplier cette marge moyenne par le nombre de mois correspondant à la durée du préavis raisonnable non respecté.


Exemple : Si la marge moyenne était de 15 261 € par mois, et que la durée de préavis raisonnable est estimée à six mois, la perte de marge brute sera de 91 566 € (15 261 € x 6 mois). En cas de litige de ce type il est recommandé de contacter ou consulter un avocat en droit commercial et des affaires à Versailles.

Estimez votre préjudice en cas de rupture partielle d'une relation commerciale


Évaluer précisément le préjudice subi lors d’une rupture partielle d'une relation commerciale établie peut s’avérer complexe. Pour vous aider à y voir plus clair, nous mettons à votre disposition un outil pratique et rapide.Grâce à cette calculette, vous pourrez en quelques instants :


  • Estimer le montant de votre perte de marge brute,

  • Comprendre l'impact de la rupture sur vos résultats financiers,

  • Disposer d'une première base d'évaluation pour initier une action juridique si nécessaire.






Cet outil repose sur la méthode validée par la Cour de cassation : le calcul de la marge brute escomptée pendant la durée du préavis non exécuté, corrigée uniquement des marges réalisées pendant cette même période.Attention : cette estimation ne remplace pas une analyse personnalisée par un avocat spécialisé, mais constitue un excellent point de départ pour évaluer vos droits.

Quelle prise en compte des commandes postérieures ?


Lorsque la rupture est partielle, seules les marges réalisées pendant la période de préavis non exécutée doivent être déduites.


Ainsi, dans l’affaire commentée, seules les marges réalisées entre juillet et décembre 2018 ont été déduites, soit 11 796 € sur un chiffre d'affaires de 13 877 €, en appliquant un taux de marge sur coûts variables de 85 %.


En revanche, les commandes passées en 2019 et 2020 ne doivent pas être prises en compte. C'est précisément cette erreur de la cour d'appel qui a conduit à la cassation partielle de l'arrêt [[Cass. com., 29 janv. 2025, n° 23-19.972]].


Attention : Toute déduction portant sur les marges réalisées après la période d’insuffisance de préavis constitue une violation du principe de réparation intégrale du préjudice.

Illustration par étapes


  • Chiffre d’affaires prévisionnel (sur préavis de 6 mois) : calcul basé sur les ventes antérieures ;

  • Application du taux de marge (par exemple 85 %) ;

  • Déduction uniquement des marges réalisées durant les six mois couvrant l’insuffisance de préavis ;

  • Aucune prise en compte des marges ultérieures (exercices suivants).


À quelles conditions la baisse de commandes est-elle qualifiée de rupture brutale ?


Toutes les baisses de commandes ne constituent pas une rupture brutale des relations commerciales. La jurisprudence impose plusieurs critères :


  • Choix volontaire de l’auteur : la diminution doit résulter d'une décision délibérée, et non d'éléments extérieurs (tels que la crise économique) [[Cass. com., 8 nov. 2017, n° 16-15.285]].

  • Caractère significatif : la baisse doit être substantielle au regard de la relation antérieure ;

  • Absence de préavis écrit tenant compte de la durée de la relation et des usages [[C. com., art. L. 442-1, II]].


Il incombe donc à la victime de prouver non seulement l’existence d’une relation commerciale établie, mais aussi la brutalité de la baisse d’activité.


Synthèse : les bonnes pratiques pour sécuriser ses relations commerciales


Pour limiter les risques liés à une rupture partielle brutale, il est recommandé :


  • De formaliser les relations commerciales par des contrats écrits précisant les modalités de préavis ;

  • D’instaurer un suivi des volumes d’affaires pour détecter rapidement une diminution anormale ;

  • De négocier en amont les conditions de rupture éventuelle (par exemple, en insérant des clauses de préavis) ;

  • De réagir sans délai en cas de baisse brutale injustifiée en envoyant une mise en demeure circonstanciée.


En cas de litige commercial, il est essentiel de documenter précisément :


  • L’historique des relations commerciales ;

  • Les volumes d’affaires sur plusieurs années ;

  • Les correspondances échangées.


La rupture partielle d'une relation commerciale établie est une source fréquente de contentieux, où l’évaluation du préjudice joue un rôle central.La décision récente du 29 janvier 2025 offre un éclairage précieux : seule la perte de marge sur la période d'insuffisance de préavis peut être indemnisée, sans déductions injustifiées.


Dans un environnement économique incertain, la vigilance contractuelle et la maîtrise du droit applicable s’imposent comme des outils incontournables pour protéger ses intérêts commerciaux.

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