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L’employeur est-il en droit de demander le casier judiciaire ?

Photo du rédacteur: Le Bouard AvocatsLe Bouard Avocats

En résumé :


  • L’employeur peut demander un casier judiciaire uniquement si cette exigence est justifiée par la nature du poste ou des obligations légales spécifiques.

  • Le salarié peut refuser de fournir son casier si la demande n’est pas encadrée par la loi ou pertinente pour l’emploi concerné.

  • Toute atteinte au respect de la vie privée ou conservation abusive expose l’employeur à des sanctions civiles et pénales.


La relation entre un employeur et un salarié repose sur un équilibre fragile entre les exigences liées à l’emploi et le respect de la vie privée. Parmi les questions récurrentes, la demande de présentation d’un casier judiciaire soulève des interrogations importantes, tant pour les candidats que pour les employeurs.


Est-il légal pour un employeur d’exiger un extrait de casier judiciaire ? Sous quelles conditions une telle demande peut-elle être justifiée ? Ces interrogations s’inscrivent dans un cadre juridique strict, visant à concilier les besoins légitimes des entreprises et les droits fondamentaux des salariés.


Cet article a pour objectif d’apporter des réponses claires et détaillées en s’appuyant sur les textes de loi applicables, notamment le Code du travail, le Code pénal, et les recommandations de la CNIL. Il s’adresse aussi bien aux employeurs qu’aux salariés, en abordant les situations où la demande d’un extrait de casier judiciaire est permise, les modalités d’obtention de ce document, et les limites légales encadrant cette pratique.



casier judiciaire salarié


Quand un employeur peut-il demander un extrait de casier judiciaire ?


Les règles générales en droit du travail


Le respect de la vie privée constitue un principe fondamental consacré par l'article 9 du Code civil. Dans le cadre des relations de travail, cet impératif est renforcé par les dispositions du Code du travail, notamment son article L1221-6. Celui-ci précise que les informations demandées à un salarié ou à un candidat doivent être directement liées à l’évaluation de ses aptitudes professionnelles et strictement nécessaires à l’exercice des fonctions envisagées.


Ainsi, la demande d’un extrait de casier judiciaire par un employeur ne peut être systématique. Elle doit s’inscrire dans un cadre précis, où la nature de l’emploi ou les responsabilités associées justifient une telle exigence. De manière générale, cette pratique est strictement encadrée afin d’éviter toute atteinte disproportionnée à la vie privée des salariés.


Le Code pénal encadre également cette pratique. En effet, exiger un extrait de casier judiciaire sans justification légale pourrait être considéré comme une atteinte au respect de la vie privée et exposer l’employeur à des sanctions.


Enfin, la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) veille à ce que les données personnelles des salariés, dont celles relatives à leur passé judiciaire, soient traitées conformément au RGPD.

Les situations où la demande est justifiée


Certaines professions ou situations particulières peuvent toutefois justifier la demande d’un extrait de casier judiciaire, notamment lorsque l’emploi implique une responsabilité ou un niveau de confiance élevé. C’est le cas, par exemple, pour des postes nécessitant la manipulation de fonds ou l’accès à des données sensibles.


Les professions réglementées sont également concernées. Pour ces métiers, des textes spécifiques imposent souvent la présentation d’un bulletin n°3 ou d’un extrait de casier judiciaire vierge. Ces exigences visent à protéger l’intérêt public et à garantir la sécurité des personnes ou des biens.


Parmi les secteurs concernés, on peut citer :


  • Les métiers liés à la sécurité, comme les agents de surveillance ou les gardes armés.

  • Les postes éducatifs ou impliquant un contact régulier avec des mineurs, tels que les enseignants, éducateurs ou assistants maternels.

  • Les professions médicales, où la confiance est primordiale, comme celles des infirmiers ou des médecins.


Exemples de professions où l’extrait de casier judiciaire est demandé


Certaines professions nécessitent impérativement la présentation d’un extrait de casier judiciaire. Parmi les exemples les plus courants, on retrouve :


  • Les métiers de la défense et de la sécurité, comme l’armée, la gendarmerie, la police, ou encore les agents de sécurité.

  • Les personnels travaillant pour des entreprises publiques ou sensibles, comme la SNCF ou la Française des Jeux, où la probité est une exigence incontournable.

  • Les professions impliquant des contacts avec des publics vulnérables, comme les assistants maternels ou les éducateurs spécialisés.

  • Les secteurs liés à la santé, où la transparence est essentielle, tels que les professions médicales et paramédicales.


Dans chacun de ces cas, la demande de l’employeur est justifiée par la nécessité de garantir la sécurité et la confiance dans l’exercice des fonctions. Toutefois, l’employeur doit veiller à respecter les procédures légales pour éviter tout abus.

Quels types de bulletins de casier judiciaire peuvent être demandés ?


Différence entre le bulletin n°1, n°2 et n°3


Le casier judiciaire regroupe trois types de bulletins distincts, chacun ayant un contenu et des règles d’accès spécifiques.


  • Le bulletin n°1 contient l’intégralité des condamnations, décisions ou mesures prononcées par les juridictions pénales françaises. Ce document, le plus complet, est exclusivement réservé aux autorités judiciaires dans le cadre de leurs fonctions.

  • Le bulletin n°2 est une version allégée, expurgée de certaines condamnations, telles que les décisions bénéficiant d’une réhabilitation judiciaire. Il peut être consulté par certaines administrations ou employeurs habilités, en vertu de textes législatifs spécifiques.

  • Le bulletin n°3, quant à lui, est destiné à la personne concernée. Il ne mentionne que les condamnations les plus graves, comme les peines privatives de liberté, et est le seul document qu’un salarié ou candidat peut présenter à un employeur.


Ces distinctions garantissent une confidentialité graduée, adaptée aux besoins de consultation légitimes tout en protégeant la vie privée de l’individu.


Accès limité pour les employeurs


L’accès des employeurs aux bulletins de casier judiciaire est strictement encadré par la loi. En pratique, seul le bulletin n°3 peut être demandé à un salarié ou à un candidat, et uniquement dans les cas où la nature de l’emploi ou des responsabilités justifie une telle exigence.


Le bulletin n°2 est accessible à certaines professions réglementées, comme les agents de sécurité ou les fonctionnaires, sur la base d’autorisations légales spécifiques. Toute demande abusive ou non justifiée constitue une violation des droits du salarié et peut exposer l’employeur à des sanctions.


Le cadre légal, renforcé par les articles du Code du travail et les recommandations de la CNIL, protège ainsi les salariés contre des atteintes disproportionnées à leur vie privée.


Comment obtenir un extrait de casier judiciaire ?


La procédure de demande par le salarié


Pour obtenir un extrait de casier judiciaire, notamment le bulletin n°3, la démarche est simple et accessible à tous. La méthode la plus rapide consiste à effectuer une demande en ligne via le site officiel du Casier Judiciaire National. Ce service gratuit permet de recevoir le document en quelques jours directement à domicile, sous réserve que la demande soit correctement renseignée.


Pour les personnes qui ne souhaitent pas utiliser la voie numérique, il est également possible de formuler la demande par courrier postal. Dans ce cas, il convient de remplir un formulaire spécifique, disponible en téléchargement sur le site, et de l’envoyer accompagné d’une copie d’une pièce d’identité.


Les résidents à l’étranger disposent également de solutions adaptées. Ils peuvent adresser leur demande auprès des ambassades ou consulats français, qui agissent comme relais auprès des autorités compétentes.

Délais et conservation de l’extrait


L’obtention de l’extrait de casier judiciaire s’effectue généralement dans un délai de 2 à 5 jours ouvrés pour une demande en ligne ou par courrier. Toutefois, ce délai peut varier en fonction de la période ou des contraintes administratives.


Concernant sa conservation, l’extrait de casier judiciaire n’a pas de durée de validité définie par la loi. Cependant, il est généralement admis qu’un document datant de moins de trois mois est requis pour garantir son actualité.


Du côté de l’employeur, la conservation de cet extrait est strictement encadrée. En vertu des recommandations de la CNIL, il est interdit de conserver une copie du bulletin au-delà du strict nécessaire. Toute violation de cette règle pourrait constituer une infraction au RGPD, exposant l’employeur à des sanctions.


Ainsi, bien que l’extrait puisse être consulté, il doit être détruit dès que sa finalité est atteinte, notamment après le recrutement.

Le salarié peut-il refuser de fournir son casier judiciaire ?


Les droits du salarié face à une demande non justifiée


Le droit au respect de la vie privée, inscrit à l’article 9 du Code civil, s’applique également dans les relations professionnelles. En vertu de l’article L1221-6 du Code du travail, l’employeur ne peut exiger de documents ou d’informations d’un salarié ou d’un candidat que si ces éléments sont directement et strictement nécessaires à l’évaluation de son aptitude à occuper le poste proposé.


Ainsi, toute demande d’un casier judiciaire hors de ce cadre légal constitue une atteinte au droit du salarié.

Une telle exigence pourrait également être considérée comme une pratique discriminatoire si elle vise à exclure un candidat sur des bases non justifiées par la nature des fonctions à exercer. Une demande abusive expose l’employeur à des sanctions. En cas de litige, un salarié peut saisir le conseil de prud’hommes pour faire valoir ses droits.


Les risques pour le salarié en cas de refus


Le salarié ou candidat est en droit de refuser de fournir un casier judiciaire lorsque la demande de l’employeur ne respecte pas les conditions légales. Ce refus est légitime et ne peut entraîner de sanctions ou d’exclusion du processus de recrutement. Cependant, un refus injustifié dans un secteur où la présentation de ce document est obligatoire (sécurité, enseignement, etc.) peut nuire à l’embauche ou à la poursuite de l’emploi.


Dans les professions réglementées, le refus de fournir un bulletin n°3 pourrait être interprété comme une incapacité à satisfaire les conditions requises pour le poste. Le salarié est donc invité à vérifier la légitimité de la demande avant de refuser. Un accompagnement juridique peut s’avérer utile pour déterminer si les exigences de l’employeur sont conformes à la loi.


Que contient un casier judiciaire ?


Infractions mentionnées sur le bulletin n°3


Le bulletin n°3, destiné exclusivement à la personne concernée, est le document le plus souvent requis par un employeur lorsqu’un extrait de casier judiciaire est demandé. Il ne contient qu’une partie des informations inscrites dans le casier judiciaire national. Plus précisément, il inclut les condamnations pénales les plus graves, telles que :


  • Les peines privatives de liberté non assorties de sursis.

  • Les interdictions d’exercer certaines fonctions ou professions.

  • Les condamnations pour crimes ou délits jugés incompatibles avec certains emplois.


En revanche, plusieurs types de décisions ne figurent pas sur le bulletin n°3. Par exemple, les condamnations avec sursis, les amendes, ou les peines ayant fait l’objet d’une réhabilitation judiciaire en sont exclues.


Cette limitation vise à préserver les droits des individus tout en répondant aux impératifs de sécurité ou de transparence exigés dans certains domaines professionnels.

La réhabilitation et la suppression des mentions


Le casier judiciaire n’est pas immuable. La loi française prévoit des mécanismes d’effacement des condamnations inscrites, notamment à travers la réhabilitation.


Conformément aux articles 133-12 et suivants du Code pénal, une condamnation peut être effacée automatiquement après un certain délai, qui varie en fonction de la gravité de la peine.


Par exemple, une condamnation à une peine de prison inférieure à un an sera effacée après 5 ans, tandis que les peines plus lourdes nécessitent des délais plus longs.


En outre, un individu peut demander une réhabilitation judiciaire, qui, si elle est accordée par un tribunal, entraîne la suppression des mentions du casier judiciaire. Ces dispositifs visent à permettre aux personnes concernées de se réinsérer pleinement dans la société et sur le marché du travail, en bénéficiant d’un casier judiciaire vierge après avoir purgé leur peine.


Ces dispositions témoignent de l’équilibre recherché par le législateur entre la nécessité de protéger les employeurs et celle de garantir aux individus le droit à l’oubli et à la réinsertion.


Casier judiciaire et confidentialité : quels droits pour les salariés ?


Protection des données personnelles


Le respect de la vie privée des salariés est un principe fondamental consacré par l’article 9 du Code civil et renforcé par les dispositions du Code du travail. Lorsqu’un employeur demande la présentation d’un casier judiciaire, il doit s’assurer que cette exigence respecte les règles strictes en matière de protection des données personnelles, telles que définies par le RGPD et la CNIL.


En effet, le bulletin n°3 d’un casier judiciaire contient des informations sensibles et confidentielles, strictement limitées à la personne concernée. L’employeur ne peut, en aucun cas, conserver une copie de ce document, sauf si cette conservation est rendue indispensable par des obligations légales spécifiques et pour une durée strictement nécessaire. Cette restriction vise à éviter tout usage détourné ou disproportionné des données collectées.


La CNIL recommande que l’employeur vérifie la conformité du bulletin présenté, sans conserver d’éléments susceptibles de porter atteinte à la vie privée du salarié. Toute infraction à ces règles expose l’employeur à des sanctions civiles et administratives, allant d’une amende jusqu’à une interdiction d’utiliser les données collectées de manière illicite.


Recours en cas d’atteinte à la vie privée


Si un employeur conserve illégalement un extrait de casier judiciaire ou l’utilise de manière abusive, le salarié dispose de plusieurs recours. Il peut, dans un premier temps, adresser une mise en demeure écrite à l’employeur pour exiger la destruction des données non conformes. En l’absence de réponse satisfaisante, le salarié peut saisir la CNIL, qui dispose du pouvoir de mener une enquête et d’imposer des sanctions.


Sur le plan judiciaire, une plainte peut être déposée auprès du tribunal compétent. L’article 226-21 du Code pénal sanctionne le non-respect des obligations de confidentialité relatives aux données personnelles par une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et une amende de 300 000 euros.

Ces dispositions, combinées aux mécanismes de contrôle de la CNIL, garantissent aux salariés une protection efficace contre toute atteinte à leur vie privée dans le cadre professionnel. Cette vigilance juridique reflète l’importance accordée par le législateur à la préservation des droits fondamentaux, même dans un contexte de subordination liée au contrat de travail.


Conclusion


En conclusion, la demande d’un extrait de casier judiciaire par un employeur est strictement encadrée par la législation française afin de préserver l’équilibre entre les besoins des entreprises et les droits fondamentaux des salariés.


L’employeur ne peut exiger un casier judiciaire que lorsque la nature du poste ou les responsabilités associées justifient une telle requête, conformément à l’article L1221-6 du Code du travail. Par ailleurs, cette demande doit être proportionnée, pertinente, et ne pas porter atteinte au respect de la vie privée du salarié.


En cas de litige ou de doute concernant la légitimité d’une telle demande, il est essentiel de recourir à un accompagnement juridique. Prendre attache avec un avocat en droit du travail à Versailles est en mesure d’analyser la situation, de conseiller les parties, et, le cas échéant, de défendre les droits du salarié ou de l’employeur devant les juridictions compétentes.


Confier cette question sensible à un professionnel permet de sécuriser les démarches et d’éviter des erreurs pouvant entraîner des conséquences juridiques lourdes.

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