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Titres acquis lors d’une augmentation de capital : quelle qualification comptable et fiscale ?

Photo du rédacteur: Le Bouard AvocatsLe Bouard Avocats

L’augmentation de capital constitue une opération courante dans la vie d’une société, souvent réalisée pour renforcer ses fonds propres, attirer de nouveaux investisseurs ou encore répondre à des obligations légales. Toutefois, la qualification comptable des titres souscrits lors de cette opération peut soulever des difficultés, notamment en matière de fiscalité et d’imposition des résultats.


La question a récemment été tranchée par la cour administrative d’appel de Paris, qui a affirmé que les titres acquis lors d’une augmentation de capital doivent recevoir la même qualification comptable que ceux acquis antérieurement lorsque l’intention de l’acquéreur est de conserver le contrôle de la société [[CAA Paris, 11 oct. 2024, n° 22PA04107]].


Cette position conforte la jurisprudence antérieure du Conseil d’État, qui s’était déjà prononcé sur la qualification des titres de participation dans le cadre de restructurations d’entreprise [[CE, 8 nov. 2019, n° 422377 ; CE, 11 juin 2024, n° 470721]].


Cet article propose une analyse approfondie des conséquences comptables et fiscales de cette qualification, ainsi que des précautions à prendre pour éviter tout redressement fiscal en cas de contrôle.



Titres acquis lors d’une augmentation de capital


1. La qualification comptable des titres acquis lors d’une augmentation de capital



1.1. Rappel des catégories de titres en comptabilité


Les titres détenus par une entreprise sont classés en plusieurs catégories comptables, en fonction de leur finalité et de l’intention de détention :


  • Les titres de participation : ces titres sont détenus en vue d’exercer un contrôle ou une influence notable sur la société émettrice. Ils permettent à l’acquéreur de peser sur la stratégie et la gestion de l’entité cible.

  • Les titres de placement : ces titres sont détenus dans une optique de gestion financière, sans intention d’influence ou de contrôle. Ils sont généralement cédés à court ou moyen terme.

  • Les autres titres immobilisés : il s’agit des titres acquis dans une optique patrimoniale, sans intention de cession à court terme ni de contrôle.


La distinction entre titres de participation et titres de placement est primordiale, car elle influe sur les règles d’évaluation, de provisionnement et de fiscalité applicables. Il est essentiel de contacter un avocat en droit des sociétés à Versailles pour mettre en place ce type de mouvement sur capital.


1.2. Une uniformité de qualification pour les titres nouvellement acquis


La cour administrative d’appel de Paris a rappelé que les titres acquis dans le cadre d’une augmentation de capital doivent être traités de la même manière que ceux acquis antérieurement, dès lors que l’acquéreur entend conserver le contrôle de la société jusqu’à sa disparition (fusion, absorption, liquidation) ou jusqu’à la cession de ce contrôle à un tiers [[CAA Paris, 11 oct. 2024, n° 22PA04107]].


Autrement dit, un changement de qualification comptable des nouveaux titres acquis au sein d’une même société n’est pas admis si l’objectif de contrôle demeure inchangé.


Ce principe s’applique même lorsque l’augmentation de capital est réalisée pour des raisons réglementaires locales, comme ce fut le cas dans l’affaire jugée par la cour administrative d’appel de Paris.


2. Conséquences fiscales de la qualification comptable des titres


2.1. L’impact sur le régime des plus-values


En droit fiscal, le régime des plus-values de cession diffère selon que les titres sont qualifiés de titres de participation ou de titres de placement :


  • Les titres de participation bénéficient d’un régime fiscal de faveur : la plus-value de cession est en principe exonérée d’impôt sur les sociétés, sous réserve d’une taxation forfaitaire de 12 % correspondant à une quote-part de frais et charges [[article 219, I-a ter du code général des impôts]].

  • Les titres de placement, en revanche, génèrent des plus-values imposables au taux de droit commun de l’impôt sur les sociétés (15 % ou 25 %, selon le cas).


La décision de la cour administrative d’appel de Paris conforte donc l’idée selon laquelle les titres souscrits lors d’une augmentation de capital conservent la qualification de titres de participation, sous réserve que le détenteur en conserve le contrôle.



2.2. Déductibilité des moins-values : une limitation en cas de titres de participation


Le régime fiscal des moins-values diffère également en fonction de la qualification des titres :


  • Moins-values sur titres de participation : elles ne sont pas déductibles du résultat imposable, sauf en cas de liquidation sans transmission universelle du patrimoine [[article 39 quaterdecies du code général des impôts]].

  • Moins-values sur titres de placement : elles sont intégralement déductibles du résultat imposable.


Ainsi, une société qui détient des titres de participation peut se voir refuser la déduction d’une moins-value en cas de cession à perte, ce qui peut entraîner des ajustements fiscaux conséquents.


Dans l’affaire tranchée par la cour administrative d’appel de Paris, l’administration fiscale a requalifié une moins-value constatée lors de la liquidation d’une filiale et en a limité la déductibilité, en appliquant les règles spécifiques aux titres de participation [[CAA Paris, 11 oct. 2024, n° 22PA04107]].



3. Précautions à prendre pour éviter un redressement fiscal


3.1. Justifier la qualification retenue dès la souscription


Pour limiter le risque de requalification par l’administration fiscale, il est essentiel de documenter précisément la qualification comptable et fiscale des titres dès leur acquisition :


  • Rédiger une note interne expliquant les motifs de l’augmentation de capital et l’intention de détention des titres.

  • Justifier la qualification de titres de participation en démontrant l’influence exercée sur la filiale (participation active aux décisions stratégiques, contrôle des organes de gouvernance, etc.).

  • En cas de titres de placement, prouver l’existence d’une gestion active et d’un objectif de cession à court ou moyen terme.


3.2. Anticiper l’impact fiscal des cessions et des pertes


Avant toute cession ou liquidation d’une filiale, il convient d’anticiper les conséquences fiscales de l’opération :


  • Si les titres sont classés en participation, s’assurer que la cession génère une plus-value exonérée et non une moins-value non déductible.

  • Si une liquidation est envisagée, calculer l’impact de la radiation des titres et de l’éventuelle déduction des pertes sur créances.


En cas de doute, un rescrit fiscal peut être sollicité auprès de l’administration pour sécuriser la qualification des titres et éviter toute contestation future.


Conclusion


L’arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Paris en octobre 2024 renforce le principe selon lequel les titres souscrits lors d’une augmentation de capital doivent être qualifiés de la même manière que ceux acquis antérieurement, sous réserve que l’acquéreur conserve le contrôle de la société.


Cette décision souligne l’importance d’une cohérence comptable et fiscale dans la gestion des participations, tant pour l’application du régime des plus-values que pour la déductibilité des moins-values.


Dans ce contexte, les entreprises doivent faire preuve de vigilance, en documentant soigneusement leur stratégie de détention et en anticipant les conséquences fiscales de leurs opérations sur le capital.

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